L'ange des neiges

Il est venu à pas feutrés, semant des diamants sur son passage, l’ange des neiges avec sa harpe d’argent. Alors qu’il longeait les jardins, des roses se cristallisèrent, atteignant ainsi l’éternité.

Les jeunes filles qui lisaient, cousaient, brodaient ou cuisinaient entendirent des airs paradisiaques et se prirent à rêver d’ailleurs célestes.

L’ange des neiges prit enfin la décision de partir vers des pays lointains où les flocons étaient inconnus.

Sous l’action de l’héritier des neiges éternelles, le désert flamba, les roses des sables devinrent autant de diamants.

Les peuples nomades qui ne s’étaient jamais résignés à placer leurs tentes sur les étagères du souvenir acceptèrent enfin la sédentarisation grâce à cette manne inespérée.

On fit jaillir l’eau des profondeurs des mers de sable blond, on canalisa des rigoles qui purent alimenter des jardins à l’ombre d’arbres porteurs de fruits.

Les femmes eurent désormais une vie heureuse, les éoliennes africaines apportant les étincelles de la modernité. Finis les reins cassés sous l’action cadencée du pilon : des robots firent une entrée triomphale dans les cuisines. Le tissage ne fut plus une corvée mais un plaisir créatif car les métiers connurent un essor sophistiqué.

Satisfait de son œuvre, l’ange des neiges rejoignit le pays où fleurissaient des édelweiss et se consacra dorénavant à l’écriture de partitions réservées aux anges. Dernier clin d’œil à son parcours atypique, il laissa quelques pages de musique s’envoler avec les premiers flocons et quelques créateurs reçurent ces messages avec bonheur, écrivant symphonies et opéras pour le bonheur de tous.